Bernard Minier – Un œil dans la nuit

Dans les montagnes, retiré du monde, un réalisateur de films d’horreur, Morbus Delacroix.
Culte, misanthrope, fou.

Parmi ses fans, une étudiante en cinéma.

Fascinée, intrépide, inconsciente.

À Toulouse, un as des effets spéciaux est retrouvé mort, ligoté sur un lit d’hôpital.

Et si ce meurtre trouvait sa source dans un film maudit ?

Pour le commandant Martin Servaz, peut-être la plus grande énigme de sa carrière…

Extrait

— Je vais mourir, mon père.

Le patient dévisageait le prêtre.

Il cligna des yeux dans la pénombre de la chambre.

Un éclat vif entre ses paupières.

L’homme qui venait de parler avait cinquante-huit ans ; ancien décorateur dans le cinéma, il se mourait en effet.

Dehors, la nuit était orageuse. Éclairs de chaleur, grondements encore distants au-dessus des montagnes. Dans la chambre, le bruit sourd, régulier, des machines. Et derrière la porte close, ceux du petit centre hospitalier : l’écho de pas et de portes, en dépit de l’heure tardive.

Le prêtre se pencha. Son visage entra dans la lumière.

— Le crabe… il est partout, mon père, articula Matthias Laugier. Métastases, ils appellent ça… Moi, j’appelle ça l’Ennemi. Car c’est une guerre. Et je l’ai perdue. J’avais aucune chance de toute façon…

Le visage du père Daniel Eyenga demeurait profondément concentré. C’était le patient qui avait réclamé sa présence. Le prêtre s’était renseigné auprès du personnel médical. Cancer de la plèvre, cancer pulmonaire en phase terminale. Avec des atteintes du péritoine, du péricarde, des testicules, du larynx. L’amiante : très présent, jusqu’à son interdiction, sur les tournages de films, dans les décors et les équipements.

— L’amiante, dit Matthias Laugier comme s’il lisait dans les pensées du curé. Il y en avait beaucoup dans les décors de cinéma à l’époque, dans la peinture, dans les gaines de ventilation, et même dans la neige artificielle. Partout. Ils l’ont interdit depuis. Mais cette saleté de maladie met trente ans à se déclarer.

Le prêtre hocha la tête.

Il avait devant lui, ouverte sur la tablette près du lit, une petite boîte en plastique renfermant une faible quantité d’huile qu’il avait bénie durant la dernière messe chrismale. Il enfila des gants avant de toucher le malade.

Dans le halo de la lampe, le visage étroit, aux os saillants, pareils à des couteaux, était aussi gris que si on l’avait frotté avec de la cendre, les yeux enfoncés dans les orbites.

Le prêtre balaya du regard la pièce faiblement éclairée, cherchant la poubelle. À cause du protocole anti-Covid, il n’avait pas le droit de sortir quoi que ce soit d’ici. Ainsi les gants, la boîte et la pipette scellée contenant le vin consacré – dont il allait déposer une goutte sur la langue du malade en guise de communion – iraient tous dans la poubelle à pédale avant d’être incinérés. Il avait mis le vin de côté lors de la dernière messe, acheté la pipette dans une pharmacie.

— Ce n’est pas seulement pour recevoir l’onction des malades que je vous ai fait venir, dit l’homme.

 larynx. L’amiante : très présent, jusqu’à son interdiction, sur les tournages de films, dans les décors et les équipements.

— L’amiante, dit Matthias Laugier comme s’il lisait dans les pensées du curé. Il y en avait beaucoup dans les décors de cinéma à l’époque, dans la peinture, dans les gaines de ventilation, et même dans la neige artificielle. Partout. Ils l’ont interdit depuis. Mais cette saleté de maladie met trente ans à se déclarer.

Le prêtre hocha la tête.

Il avait devant lui, ouverte sur la tablette près du lit, une petite boîte en plastique renfermant une faible quantité d’huile qu’il avait bénie durant la dernière messe chrismale. Il enfila des gants avant de toucher le malade.

Dans le halo de la lampe, le visage étroit, aux os saillants, pareils à des couteaux, était aussi gris que si on l’avait frotté avec de la cendre, les yeux enfoncés dans les orbites.

Le prêtre balaya du regard la pièce faiblement éclairée, cherchant la poubelle. À cause du protocole anti-Covid, il n’avait pas le droit de sortir quoi que ce soit d’ici. Ainsi les gants, la boîte et la pipette scellée contenant le vin consacré – dont il allait déposer une goutte sur la langue du malade en guise de communion – iraient tous dans la poubelle à pédale avant d’être incinérés. Il avait mis le vin de côté lors de la dernière messe, acheté la pipette dans une pharmacie.

— Ce n’est pas seulement pour recevoir l’onction des malades que je vous ai fait venir, dit l’homme.

L’attention du père Eyenga se reporta sur le patient. Celui-ci avait prononcé cette dernière phrase avec une intonation des plus étranges.

— Si je vous disais ce que j’ai vu, mon père, vous en perdriez le sommeil, croyez-moi… Vous perdriez votre foi en Dieu.

Le patient regardait fixement l’ecclésiastique. Ce dernier vit au fond des orbites du malade une lueur qui lui arracha un frisson.

— Que voulez-vous dire, mon fils ?

— L’enfer, mon père… J’ai été un de ses démons…

Avis

Voici le retour tant attendu du héros favori de Bernard Minier, le dénommé Martin Servaz. Enfin pour être tout à fait exact et honnête, ce policier à la célèbre renommé n’intervient qu’en seconde partie de roman.

En effet la première est consacrée à la découverte d cette jeune étudiant en cinéma et de sa rencontre avec son cinéaste favori, mais très mystérieux et discret Morbus, à la renommé sulfureuse dans le milieu du cinéma d’horreur.

Alors que j’avais été déçu des précédents romans de Bernard Minier, j’avoue avoir été accroché par ce roman qui comporte toutes les caractéristique j’aime trouver dans un livre. Un côté original (le milieu du cinéma gore dont je ne connais plus l’histoire que leur visionnage), une énigme honnête (pas très retors car malheureusement l’auteur ne laisse guère d’alternatives possibles), un policier que l’on suit sur plusieurs histoires et de l’humour. D’ailleurs  croire que lui et Franck Thilliez se sont donnés comme mot ou comme défit de faire référence à son confrère d’écriture dans leur roman. Certes il y a une rencontre rapide entre Sharko et Servaz,  mais de nombreuses allusions sont faites à son homologue (faites attention aux titres des films par exemple).

Le seul petit hic est le double final : le final de l’enquête et le final du livre. Sincèrement, s’il amène un gros cliffhanger, l’auteur aurait tout aussi bien pu s’en passer. J’ai trouvé pour une suite la technique un peu trop facile.

P.S : Je tiens à souligner la très bonne version du livre audio. Une belle mise en valeur du texte et de l’histoire sans surjeu.

Notation

Histoire
Personnages
Rythme
Énigme
Écriture
Durée de lecture
Prix

Caractéristiques :

Livre

  • Broché
    • Broché ‏ : ‎ 501 pages
    • Éditeur ‏ : ‎ XO (6 avril 2023)
    • Langue ‏ : ‎ Français
    • ISBN-10 ‏ : ‎ 2374484971
    • ISBN-13 ‏ : ‎ 978-2374484976
    • Prix : 22,90€
  • eBook
    • Taille du fichier ‏ : ‎ 1992 ko
    • Éditeur ‏ : ‎ XO (6 avril 2023)
    • Langue ‏ : ‎ Français
    • EAN : 978-2374484983
    • Prix : 14,99€
  • Livre Audio
    • Durée : 11h54
    • Éditeur ‏ : ‎ Lizzie (6 avril 2023)
    • Langue ‏ : ‎ Français
    • EAN : 979-1036602962
    • Prix : 22,99€

Revue de presse

« Avec Un oeil dans la nuit, Bernard Minier se fait son film d’horreur… Servaz n’est pas au bout de ses peines. » Bruno Corty, Le Figaro littéraire

« Une habileté diabolique…impossible de fermer l’œil jusqu’au bout de la nuit. », Bernard Lehut, RTL

« Avec son nouveau thriller, Bernard Minier offre autant une séance de cinéma gore qu’un polar de très haute volée. Au-delà de l’intrigue qui réserve son lot d’effroi et de rebondissements, on retrouve la technique de ce maître du thriller. (…) Minier, avec son écriture qui n’a jamais été autant cinématographique, brouille les frontières. Et à l’instar de certains films, il faut lire ce thriller jusqu’à la toute fin. Comme un rebondissement post-générique, la liste des œuvres à voir présentée à la fin du roman comporte quelques surprises. Du grand, grand art. » Olivier Bureau, Le Parisien

« Bernard Minier est l’un des maîtres du thriller contemporain. », Baptiste Liger, Lire

« Un thriller glaçant, en haute montagne, du palpitant Bernard Minier. (…) La trame de ce thriller qui vous aspire telle une centrifugeuse pour vous rejeter, cinq cents pages plus loin, dans un état post-traumatique. », Anne Crignon, L’Obs

« Du vrai, du pur thriller…bienvenue dans l’univers angoissant mais génial de Bernard Minier. », Nicolas Carreau, Europe 1

« Personnage fétiche de Bernard Minier, Martin Servaz sert de boussole à cette intrigue satanique. », Frédérick Rapilly, Télé 7 Jours

« Un thriller qui se déploie comme un film…Bernard Minier est un virevoltant conteur et un prodigieux styliste. », Jean-Rémi Barland, La Provence

« Ce n’est pas une confirmation mais une consécration. (…) On se précipite sur cette nouvelle enquête du commandant Martin Servaz, à la recherche d’un réalisateur de films d’horreur complètement azimuté vivant en ermite dans la Montagne. Effrayant. », Nous Deux

« Pour les besoins de son nouveau roman, Bernard Minier a visionné plus de 200 films d’horreur », Libération

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